Ennui et le divertissement

L'ennui et le divertissement

Il y a bien là quelque chose d’intenable, voire d’écoeurant (c’est ce que Sartre vise dans la Nausée), dans cette expérience où il n’y a pas d’exi-stence puisqu’il n’y a que stabilité et où « notre fin n’est jamais notre fin ».

L’homme s’expose alors à la noirceur (i.e. à la mélan-colie, à la bile noire), à la dépression : il s’emploie donc à s’en divertir. Mais le divertissement est ici visé non seulement au sens d’amusement di-vertissant mais aussi au sens d’une activité sérieuse par laquelle l’individu se donne des fins à poursuivre pour éviter la question de la vérité ontologique. Il est donc bien di-vertit, dé-tourné de ce qui se révèle à l’homme dans l’ennui : la misère de sa propre finitude.

Pour autant, cette misère est encore plus grande lorsque l’individu souhaite s’en détourner car il s’agit alors d’une misère qui s’ignore et qui passe à côté de la potentialité formatrice dont recèle l’ennui.

Il s’agit donc bien de combler ce vide de l’ennui sans pour autant l’éviter. Pour Pascal, cette expérience de l’ennui comme vide infini est donc nécessaire et l’individu ne peut le combler que par un être lui aussi infini, bonzaï : le Dieu de Foi. Toutefois, cette réponse n’en est qu’une parmi un large éventail.

Plusieurs réponses possibles existent mais il s’agit de savoir si ces activités relèvent bien d’une reprise sur l’ennui plutôt que d’un divertissement hors de l’ennui (ce qui n’implique pas de les juger mais bien d’en déterminer le statut).

Il y a donc bien là une différence essentielle entre l’homme du divertissement et l’homme de la reprise. L’homme du divertissement ne veut rien savoir de ce qui se trouve dans l’ennui, persuadé de ne pas avoir de vide ontologique, il est celui qui se croit c'est-à-dire qu’il croit à sa propre consistance ontologique ; sûr que son projet n’est là que pour révéler un être profond qu’il a déjà, il vit dans le futur.

C’est donc dire que si survient un ennui (mécanique), l’homme du divertissement, incapable d’être fidèle à lui-même car étant lui-même illusoire, s’effondre aussitôt dans la dépression totale. Au contraire, l’homme de la reprise est celui qui se reprend après l’ennui, il sait que tout ce qu’il entreprend se fait sur le fonds constant que lui révèle l’ennui, i.e. sa propre nullité ontologique.

S’étant exposé à cette nullité, il s’est aussi exposé à sa véritable fin, sa mort toujours déjà imminente ou comme le dit Heidegger à « la possibilité de sa propre impossibilité » et il s’agit alors pour lui de gagner du sens sur le non-sens. Autrement dit, l’homme de la reprise ne s’estime pas posséder sa propre consistance ontologique, il ne vise donc pas ce qu’il sera mais ce qu’il aura été, il vit au futur antérieur.

Il y a pour lui, quelque soit son activité, une fidélité à lui-même, c’est pourquoi il lui est possible de regarder le passé comme relié à son présent parce que ce qu’il a entrepris dans le passé compose ce qu’il est, cela peut soutenir son propre sens sans illusions sur sa propre essence toujours déjà inscrite sur le fonds de l’absence ontologique de sa propre mort révélée dans et par l'ennui.

Ennui. (2006, mai 13). Wikipédia, l'encyclopédie libre. Page consultée le 14:41, mai 19, 2006 à partir de http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Ennui&oldid=7251151.

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